Le Livre de mon fils

V

Si tu savais la satisfaction de l'intelligence que tu trouveras dans le christianisme. On t'a parlé de ses mystères. Les mystères de la Religion ne sont pas des murs à quoi notre raison se heurte blessée. Ils sont comme des puits insondables : on n'en peut voir le fond. Ton œil traduit en impression visuelle les vibrations comprises entre le rouge et le violet. Tu ne vois pas au-delà du violet et pourtant le gamme infinie des ondes se poursuit. Je te donne cette comparaison, mais n'assimile pour autant pas les mystères de la Religion aux mystères de la nature. Ils diffèrent comme l'ombre et la lumière. Les mystères de la nature sont une ombre qui se projette sur ta connaissance. Les mystères de la Religion sont une lumière trop forte. Tu ne peux la soutenir de face. Ou plutôt, non, car tu peux les contempler, ces mystères. Ils sont comme un horizon si large que des milliards d'années ne te permettraient de l'embrasser. Mystère de la Sainte Trinité ! Que Dieu soit Un et Trois, quoi de plus satisfaisant pour l'intelligence ? Elle pressent une logique si exacte qu'elle en éprouve une joie. Dieu est vivant et il est simple. Ces deux propositions exigent la Trinité. Dieu est simple : il est tout entier dans son action. Il est vivant, son action même est personne. Et Dieu contemple Son Verbe, et le Verbe contemple le Père qui l'engendre, et si vivante est leur joie et si pleinement ils s'y donnent qu'elle est personne et leur égale. Et pourtant Père, Verbe, Esprit, Vous ne pouvez être qu'un seul Dieu, sans quoi Vous ne serez plus un Dieu. Père, Fils, Esprit, inépuisable Trinité, il nous fait taire, ici venus. Nous savons que vous êtes Un et Trois, et notre intelligence en a conçu de la joie, mais les yeux de notre chair, mais les yeux même de notre âme sont trop faibles pour seulement entrevoir la splendeur de votre éternel échange. Vous êtes le Dieu caché, non par les nuées qui vous dérobaient à Moïse, mais par votre propre beauté, Saint d'Israël, O mon Dieu !

Mon fils, tel est le Dieu que je t'ai donné. C'est pour lui que je t'ai transmis la vie que je portais enclose en moi. Et, mon fils, ce Dieu incommunicable est ton Père.